vendredi 29 juin 2018

Comment l'Etat essaie de mettre la Caisse des dépôts au pas


Comment l'Etat essaie de mettre la Caisse des dépôts au pas
La Caisse des Dépôts (Leemage)

L'Etat essaie-t-il de prendre le contrôle de la Caisse des Dépôts, très jalouse de son indépendance ? Le projet de Loi Pacte touche au statut de cette institution garante de l'épargne du Livret A. Polémique assurée.
Par Clément LacombePublié le 22 juin 2018 à 18h35



Voilà une vénérable maison aussi méfiante que jalouse de son indépendance depuis maintenant 202 ans. Normal après tout, car la Caisse des dépôts a justement été créée en 1816 pour protéger l’épargne des Français de toute tentative de captation par l’Etat, pour éviter que l’exécutif ne siphonne leurs bas de laine comme venait de le faire Napoléon pour ses guerres ; des fonds ensuite utilisés pour financer à long terme des projets d’intérêt général (logement social, infrastructures…).

Pour empêcher toute prédation par l’exécutif, la Caisse des dépôts a été placée depuis sa création sous la protection du Parlement. A travers essentiellement une institution : la Commission de surveillance, qui supervise les politiques menées et où députés et sénateurs ont un poids prépondérant.

Sauf que le projet de loi PACTE que vient de présenter Bruno Le Maire prévoit, au milieu d’une kyrielle de dispositifs de tous ordres (privatisations, objet social de l’entreprise...), une réforme de la composition de cette Commission de surveillance. Un point resté assez inaperçu dans le catalogue de mesures mais que des parlementaires actuels ou passés de la Commission de surveillance comme des syndicalistes maison évoquent une prise de contrôle de l’institution par l’Etat. "Je n’aurai jamais laissé passer cette réforme qui ressemble fort à une mise sous tutelle", raconte ainsi Marc Goua, l’ancien député socialiste du Maine-et-Loire qui a présidé la Commission de surveillance en 2017 après la mort d’Henri Emmanuelli.
Six mois d'agitation en coulisses

En fait, cela fait plus de six mois qu’on s’agite en coulisses. Sensible, forcément sensible. Parce que les réformes du statut de cet animal hybride qu’est la Caisse des dépôts sont rarissimes – elles se comptent sur les doigts d’une main depuis sa création en 1816. Parce que la puissance financière de l’institution est considérable (250 milliards d’euros d’épargne des Français déposés essentiellement sur les livrets A, les dépôts des consignes des notaires, la gestion d’une cinquantaine de régimes de retraite, une palanquée de participations dans des grands groupes…).

Parce qu’aussi les rapports entre la Caisse et le ministère des finances sont notoirement compliqués : la première soupçonne régulièrement le second d’ingérence et de vouloir la mettre à contribution dès que l’Etat a besoin de financer une dépense ; le second, lui, accuse tout aussi régulièrement la première d’être poussiéreuse, mal gérée et de se moquer ouvertement de lui. Aussi Bercy a-t-il voulu profiter de la loi PACTE pour mettre la Caisse aux "meilleurs standards en matière de gouvernance d’entreprise".

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